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Les négociants bordelais vendent de plus en plus de vins étrangers

La place de Bordeaux traditionnellement associée à la vente des grands crus de Gironde assume désormais le fait de vendre leurs homologues internationaux. Elle vise aussi les autres grands domaines des différents vignobles français.

Propriétaire de Castellare di Castellina, Paolo Panerai est tout sourire. Son meilleur cru, I Sodi di S. Niccolò classé depuis quatre décennies parmi les Supers Toscans, va être distribué par la place de Bordeaux en France et dans plusieurs pays du monde par une douzaine de négociants : « Nous sommes déjà présents aux Etats-Unis mais le négoce bordelais qui couvre tous les continents va nous permettre d’élargir notre distribution notamment en Asie. » C’est un courtier spécialisé apparu il y a moins d’un an, le Bureau des Grands Vins, qui a joué le rôle d’intermédiaire.

Pendant longtemps pourtant les négociants bordelais ont ignoré ce marché, leur ADN étant de vendre les vins des grands châteaux des bords de la Garonne. « Les grandes propriétés bordelaises voyaient cette concurrence d’un mauvais oeil », reconnaît le courtier François Lévêque, dont le bureau vient aussi de créer une entité dédiée aux vins étrangers.

Les choses ont changé lentement avec les grands vignobles bordelais. En 1997, la famille Rothschild s’allie avec les propriétaires de Concha y Toro pour créer Almaviva, un grand vin franco-chilien dont la distribution est confiée à la place de Bordeaux. En 2004, Opus One, grand cru de la Napa Valley né trois décennies plus tôt d’un partenariat entre les Rothschild et Robert Mondavi, voit aussi sa distribution passer à Bordeaux. Le véritable virage intervient en 2009 quand Masseto, surnommé le « Petrus italien », est distribué à travers la Place de Bordeaux.

Et la Bourgogne

D’abord restée discrète, cette activité s’est accélérée depuis deux ans et concerne aujourd’hui une centaine de vins. Avec un mode de fonctionnement fidèle à celui de la place de Bordeaux. Il n’y a pas d’exclusivité et la distribution est confiée à plusieurs négociants qui s’engagent à respecter un prix de vente conseillé aux clients. Une vingtaine de négociants de la place se sont convertis plus ou moins discrètement à ce nouveau business. « La région de Bordeaux a vocation à devenir l’épicentre de la distribution des grands vins du monde. Il n’y a pas de cannibalisation au contraire car c’est même un moyen de développer le négoce », s’enthousiasme Matthieu Chadronnier président de CVBG.

Logiquement certains voient déjà plus loin et lorgnent vers les autres vignobles de l’Hexagone. « Je suis intimement persuadé que la Bourgogne aurait un grand intérêt à vendre ses vins par la place de Bordeaux pour leur assurer davantage de visibilité », assure Jean-Quentin Prats directeur général de Joanne Rare Wines.

Les grands domaines viticoles observent et s’interrogent. « On peut voir les choses de deux façons. L’une consiste à penser que si Bordeaux devient la place de tous les vins du monde cela profitera à tout le monde. L’autre que l’énergie mise par le négoce sur ces vins ne sera pas consacrée à ceux de Bordeaux. On verra mais aujourd’hui la question reste ouverte », analyse prudent Nicolas Glumineau, directeur général de Château Pichon Longueville Comtesse de Lalande.

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